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22 janvier 2015 4 22 /01 /janvier /2015 18:59

En 2011, un colloque réunissait durant trois jours à Clermont Ferrand des chercheurs et acteurs locaux sur le thème de la "labellisation et mise en marque des territoires".

En effet, nous ne pouvons plus passer à côté de ses listes de villes primées chaque année pour leurs bonnes pratiques dans tous les domaines possibles : Pavillon Bleu, Territoires de commerce équitable, Territoire bio engagé, Rubans du développement durable, Territoires innovants, ... . La liste ne cesse de s'allonger, mais dans quel intérêt ?

Retour sur quelques éléments de réflexion donnés par les spécialistes de la question mobilisés lors du colloque de Clermont Ferrand en 2011 - morceaux choisis : 

" De plus en plus de territoires cherchent à faire reconnaître leurs spécificités culturelles (productions alimentaires associées à des terroirs, paysages, patrimoines, savoir-faire, manifestations artistiques …), en s’inscrivant dans des démarches de labellisation, qui reposent sur l’identification, la caractérisation des lieux pour obtenir protection et/ou notoriété à diverses échelles défensif d’une société saisie de l’angoisse de sa propre banalisation, ou bien participe-t-il à un ré-enchantement du monde susceptible de déboucher sur de nouvelles dynamiques créatives fondées sur une reterritorialisation des identités et des économies ? (...)

Labelliser, pour le public et les acteurs, revient à distinguer la qualité d’un patrimoine, d’un lieu, d’un produit, définir d’une certaine façon ce qu’est « l’authentique », vouloir appréhender le « beau », ce qui conduit à une réflexion sur la production de normes dans ce domaine et simultanément à nous interroger sur les représentations sociales qui sous-tendent la démarche : quels sont les référentiels des acteurs de la labellisation, leurs représentations des lieux, leurs systèmes de valeurs ? Par qui sont conduites les procédures de labellisation, pour qui, pour quoi ? (...) Le colloque s'interroge aussi sur la prise en compte de l’imaginaire, de « l’esprit des lieux » par les procédures de labellisation et examiner de façon précise les modalités de construction des images, les mécanismes conduisant à une esthétisation des lieux. 

Qu’il s’agisse de tourisme, de production agricole ou de savoir-faire artisanal, les enjeux économiques attachés au processus de labellisation sont essentiels. (...) Mais peut-on mesurer les conséquences économiques d’une opération de labellisation ? Quel est l’effet du marketing territorial sur la durée ? La labellisation crée-t-elle une rente monopolisée par certains acteurs et territoires au détriment d’autres ? Dès lors l’enjeu territorial ne réside-t-il pas davantage dans l’affirmation d’une attractivité culturelle pour une « classe créative » que dans la promotion de produits touristiques ? Les milieux ruraux participent-ils de cette forme d’attractivité jusqu’ici principalement étudiée pour le milieu urbain au travers de la ville créative ?

 

La labellisation recouvre aussi des enjeux politiques, territoriaux, identitaires. Quel projet de territoire sous-tend une démarche de labellisation ? Quelles luttes de pouvoir sont associées à ces démarches ? Comment se manifeste l’appropriation de la culture, comprise au sens large, par le politique ? Ne s’agit-il pas souvent de tenter de légitimer ou d’imposer une autre construction territoriale ? En matière de tourisme, est-ce la promotion d’un territoire partagé et disputé entre ses habitants et visiteurs, ou d’un espace muséifié, sanctuarisé, transformé en objet de tourisme culturel ? Comment prendre la mesure des changements sociaux, tels que la gentrification, associés aux procédures de labellisation ? 

Enfin, la diversité des labels n'est-elle pas au risque de la banalisation : Si toute démarche de labellisation, par son caractère normatif, entraîne sans doute une certaine standardisation, reste à envisager par quels processus celle-ci s'opère : domination de certains groupes d'acteurs, désir de répondre aux attentes (supposées) de consommateurs ou de visiteurs, compromis adoptés entre les acteurs dans la démarche de labellisation...? Ces mécanismes génèrent-ils des phénomènes d’exclusion ? Conduisent-ils à reléguer au second plan des dimensions importantes aux yeux des sociétés locales ? On peut enfin s’interroger sur d’éventuels effets de banalisation liés à une « mise en marque » généralisée des territoires."

 

Maintenant reposez-vous toutes ces questions pour tous les labels que compte votre ville d'origine, votre lieu d'habitation, la commune où vous travaillez... Un autre regard sur ce phénomène ! 

 

Source photo www.inforoutes.fr // Source texte http://calenda.org/203423

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